L’atmosphère est lourde… la sueur coule sur la jante arrière… Le tonnerre s’est déclenché dans 3 cylindres démesurés et le train arrière sait qu’il va devoir encaisser une force terrible. La Rocket III devient encore plus méchante, plus puissante, plus mégalomane et le fait savoir en se prénommant désormais Storm.
Un substantif très équivoque, que la marque anglaise avait déjà manié avec une férocité semblable pour une version spéciale de la 1700 Thunderbird dans les années 2010. Avec son gros twin parallèle et son regard de Speed Triple, la T-Bird Storm donnait vraiment dans le méchant. La nouvelle dimension de la Rocket III suit la même envie, avec un orage dans ses entrailles.
Bien plus sombre, le gros cruiser de Triumph transpire encore plus la grogne. Toute la ligne d’échappement a été noirci mais aussi les supports d’étriers de frein, le garde-boue avant, le cuvelage des phares, les tés de fourche, les commandes, les pontets, le bâti arrière et les écopes de radiateur. Seule la ceinture dorsale et le bouchon du réservoir ont échappé à la nuit. La Storm reçoit quasiment le même traitement de surface que la série spéciale « Black » de 2021, avec toutefois un nappage de couleur sur la moitié du réservoir. Même avec ça, pas moyen de faire retomber cette tension de fauve.
Cette moto est dans une catégorie bien à part. La sienne en fait. Tout s’apprécie dans des dimensions d’un autre plan. Ce réservoir immense, ses pneus larges comme ceux des plus éloquents show-bike, ce regard de dingue faussement sage, cette finition. Détailler la Rocket III est toujours un moment fantasmagorique. En particulier cet énorme moteur, tellement gros qu’il a fallu le placer en position longitudinale. Il n’a pas le panache d’un twin américain du Wisconsin mais il l’écrase à la moindre accélération. Et c’est là que la Rocket III Storm se distingue véritablement. Sa puissance a été augmenté de 15 chevaux, pour atteindre 182 bourrins !
Elle en avait déjà tout le tour du ventre, avec un couple qui dévastait tout. Celui-ci a été aussi été poussé, de 4 Nm. Presque 23 mkg viennent prêter main forte aux 182 ch de ce bloc monumental de 2458 cm3.
Mais tous ses watts, elle les connaissait déjà. Uniquement dans sa version TFC.
Depuis, toutes les autres Rocket III se limitaient à 167 ch atteints à 6 000 tr/mn. Aujourd’hui, la Storm pousse sa démence 1000 trs plus tard. Pour cracher sa quinaine de canassons supplémentaires, le gros bloc augmente son taux de compression, revoit ses soupapes et modifie ses arbres à cames. En bonus, il passe lanorme Euro5b.
Long comme un paquebot et pas vraiment léger, la Rocket III a cependant toujours surpris par sa conduite bien plus alerte que son gabarit ne le laisse supposer ; sans que ce soit un roadster mid-size non plus. Le Storm compte améliorer un peu cela avec de nouvelles jantes allégées d’un kilo, redessinées, et équipées de pneus Metzeler Cruisetec.
Pas plus pas moins. D’aucune modification châssis ne conçoit le Storm. Vu la tronche du matos, tu comprends qu’il n’y a rien à toucher. Le robuste cadre en aluminium tient fermement une grosse fourche inversée de 47 mm. Les éléments de suspension sont signées Showa. Les pneus mesurent 150 et 240 m de large et le freinage est redoutable. Aux vues de la puissance du bestiau et de son poids (317 kg), il faut bien du Brembo Stylema avec 4 pistons par étriers pour tordre les disques avant de 320 mm. L’arrière aussi ne fait pas semblant, avec un étrier Brembo et 4 pistons lui aussi, autour d’un grand disque de 300 mm.
Présente sur le marché depuis 5 ans, la 2500 Rocket III s’est, dès le départ, équipé d’un bon paquet d’assistances à la conduite. De nouvelles sont apparues depuis mais la Storm n’en a cure. Elle se satisfait très bien de la dotation reconduite, à savoir un ABS et un contrôle de traction sensible à l’angle, un régulateur de vitesse, un assistant au démarrage en côte et 4 Modes de conduite (Road / Rain / Sport / Rider configurable). Le shifter est en option, tout comme le système de connectivité, les poignées chauffantes, de la bagagerie, et plus d’une cinquantaine d’accessoires.
Le pilote est toujours assis à 773 mm du sol, avec des commandes aux pieds réglages en hauteur sur 15 mm. Si la version GT propose une attitude très custom Softail, notre R Storm met le corps dans une position plus vindicative. Tant mieux : ce n’est pas une Trident 660 ; ici, la poignée de gaz libère les enfers. De quoi affoler les bras, les yeux, la colonne vertébrale, et l’aiguille du compte-tours. Celle-ci s’agite virtuellement sur un compteur TFT couleur. Coté électronique de « plaisance », la Storm reprend là aussi les solutions de l’ancienne Rocket III R, soit l’allumage sans clé, une prise USB, tout l’éclairage à LEDs et des commodos rétro-éclairés.
Pour fêter son 20ème anniversaire, la Rocket III déchaine toute sa puissance sous le couvert d’une nouvelle appellation. Une machine toujours exceptionnelle, chère et surprenante, pour des sensations d’un autre monde.
M.B. - Photos constructeur