Une bête ! Une bête assoiffée de performances. Quand Kawasaki a crée la ZX-10R de 3eme génération, le petit monde du sport moto a clairement vu que la tension montait d’un cran chez les verts. Avec une électronique poussée, un monstrueux moteur de 200 chevaux supervisé par un contrôle de traction, un châssis paré pour le Superbike, la Ninja prend les devants chez les hypersports japonaises.
Pendant que la version WSBK fristouille en milieu de scène (un net progrès par rapport à 2010), la sœur EWC s’est sérieusement préparée pour l’endurance. La ZX-10R version 2011 est à peine sortie de l’usine qu’on la jette directement dans l’une des plus prestigieuses et des plus dures courses de la discipline : le Bol d’or. Etait-elle prête à ça ? Pas qu’un peu : avec le team GSR, elle finit les deux tours d’horloge en 2eme position, à 6 tours du vainqueur.
Alors, regardons de près pourquoi. Car cette performance, la Kawa ne la doit pas uniquement à ses géniteurs. L’équipe de Gilles Stafler s’est occupé d’elle pour en faire un monstre d’efficacité.
La première étape, c’est de virer tout ce qui sert à rien et de changer certaines pièces obligatoires, puis d’en optimiser d’autres. On modifie les phares, le réservoir, la selle, le bras oscillant… et on balance une vingtaine de kilos à la poubelle. Le moteur passe par une préparation Team SRC et Bernard Lecour pour ensuite cracher ici de gros chevaux, avec encore plus de fougue qu’en série. Le GSR en annonce plus de 200. En fait, il doit en avoir une bonne vingtaine de plus à la sortie de la boite.
Quand Olivier Four, Julien Da Costa, Gregory Leblanc et Guillaume Dietrich libéreront cette grosse cavalerie, ils vont également tordre (façon de parler) le châssis pour exploiter au taquet la partie-cycle encore plus affutée qu’à l’origine. Les suspensions ? Tout passe en Öhlins. A l’avant, on case dans les tés Robby taillé dans la masse une fourche pressurisée FGR 700 de 43 mm – du matos utilisé en championnat du monde Superbike et jusqu’à récemment en MotoGP. Au niveau possibilité de réglages et freinage, il n’y a pas mieux, sauf les fourches dites ‘usines’. Même signature pour l’élément arrière, doré à la suédoise avec la référence TTX.
Le pot d’échappement ? Moche et asthmatique. Un petit élément Léovince est certes plus sonore (la mélodie y gagne, pas les tympans) mais surtout plus léger et améliore le souffle.
Les jantes ? Des 16.5 pouces de chez Marchesini, si légères qu’elles pourraient presque voler sur les vents du sud. Quand au freinage, c’est dans le must de ce que peut faire Nissin ; tout radial bien sûr. Les raccords Staübli permettent de changer les étriers de frein en 10 secondes.
Elle veut aller vite ? Tout est là. Elle veut faire de l’endurance ? Alors, on va lui apporter les mêmes modifications qu’aux copines. Un réservoir de 24 litres avec vannes zénith pour faire des relais conséquent et des ravitaillements rapides. Une échelle de comparaison ? Avec un réservoir de série, on peut tenir un peu plus d’une demi-heure puis il faudra au moins 2 minutes pour ravitailler. Dans cette configuration EWC, la ZX-10R tourne presque une heure et le ravitaillement se claque en 15 secondes tout compris.
Pour arriver à ce chrono de fou, un système de changement rapide de roues est installé à l’avant comme à l’arrière. Quasiment chaque moto engagée en Endurance en possède un ; mais les systèmes sont tous plus ou moins artisanaux. Chaque team développe une petite astuce ou une pièce spéciale qui améliore une phase du ravitaillement. On bricole parfois pendant des semaines pour gagner une seconde. Mais une seconde de gagnée multipliée par chaque relais, cela donne un bonus de 23 ou 24 secondes au bout de 24 heures. Pas grand-chose à priori… ne le dites pas à membres du S.E.R.T : l’écart qui les séparait de la victoire contre le GMT 94 aux 24 heures du Mans 2005 était de 20.459 secondes. Vous comprenez maintenant l’intérêt de chaque instant de grappillé sur le chrono.
Pour la course, la ZX-10R GSR laisse le soin à son équipe de la bichonner et de la ravitailler en une tranche de minute. Son envie est autre : foncer, virer, angler, cracher le feu, et vaincre. Réponse après le drapeau à damier.
M.B - Photos Team Kawasaki SRC
2011